PLF 2022 : Principales mesures
Le projet de loi de finances pour 2022 (PLF 2022) comprend de nouvelles mesures, à destination des entreprises et des particuliers, qui sont notamment les suivantes :
- pour les entreprises, les règles régissant la transmission d’une entreprise individuelle, ainsi que l’exonération des plus-values réalisées dans le cadre d’un départ à la retraite d’un dirigeant, devraient être aménagées. Si le départ à la retraite précède la cession, et si un entrepreneur fait valoir ses droits à la retraite entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2021, le délai de départ à la retraite serait repoussé de 24 à 36 mois. Pour la transmission d’une entreprise individuelle, les règles concernant la valorisation des actifs transmis seraient clarifiées.
- en matière de TVA, en ce qui concerne les opérations bancaires et financières, les opérateurs du secteur financier pourraient opter, opération par opération, pour la TVA, et non plus globalement. En outre, à compter du 1er janvier 2023, la TVA sur les livraisons de biens serait exigible dès le versement d’acomptes.
Par ailleurs, les taux réduits de TVA, applicables dans les secteurs agroalimentaire et de la santé, feraient l’objet d’aménagements, pour être plus cohérents.
- pour les particuliers, le barème de l’impôt sur les revenus de 2021 serait revalorisé de 1,4%. En outre, les services à la personne éligibles au crédit d’impôt seraient modifiés pour englober certains services rendus à l’extérieur du domicile.
En matière de non-résidents, pour les personnes morales établies dans l’Union Européenne, ou l’Espace Economique Européen (EEE), un abattement de 10% du montant brut s’appliquerait pour le calcul de la retenue à la source sur les revenus non salariaux.
Imposition du crédit-vendeur sur la totalité de la plus-value : le Conseil Constitutionnel saisi !
Le crédit-vendeur permet d’échelonner le paiement du prix selon une chronologie convenue entre les parties. Toutefois, fiscalement, l’article 150-0 A, I du CGI conduit à imposer le vendeur l’année de la cession sur la totalité de la plus-value, même si, au titre de cette année, il ne perçoit qu’une partie du prix de la vente.
Un contribuable a considéré que les dispositions de cet article portaient atteinte au principe d’égalité devant les charges publiques, dans la mesure où elles ne permettent pas aux particuliers ayant cédé des titres au moyen d’un crédit-vendeur d’obtenir une réduction de l’imposition relative à la plus-value des parts cédées en fonction des sommes réellement reçues.
De ce fait, le Conseil Constitutionnel a été saisi sur la conformité à la constitution, de l’article 150-0 A, I du CGI.
Intégration de la perte ou du gain de change à la plus-value de cession de titres
Dans un arrêt, en date du 13 septembre 2021 (CE, 13 septembre 2021, n° 443914), le Conseil d’Etat confirme la jurisprudence antérieure, et juge qu’en cas de cession de valeurs mobilières étrangères, les prix de cession et d’acquisition à retenir pour le calcul de la plus-value, doivent être convertis en euros, par application du taux de change applicable respectivement à la date de la cession, et à la date d’acquisition des titres.
Signature d’une nouvelle convention fiscale entre la France et la Belgique
En date du 9 novembre 2021, la France et la Belgique ont signé une nouvelle convention en matière d’impôts sur les revenus, qui se substituera à la convention du 10 mars 1964, à l’issue du processus législatif de ratification dans chacun des Etats.
Cette nouvelle convention aligne les règles conventionnelles applicables aux opérations entre la France et la Belgique sur les derniers standards internationaux, notamment le modèle OCDE de convention fiscale de 2017, intégrant les recommandations issues du projet « BEPS ».
Les notions de résidence fiscale, et d’établissement stable, sont notamment redéfinies par cette nouvelle convention, laquelle introduit également une clause générale anti-abus.
Enfin, elle préserve le droit d’imposer des deux Etats concernant les plus-values afférentes aux biens immobiliers qui y sont situés, ou en cas de participation substantielle dans une société y résidant.
Cas d’application de l’ancienne convention fiscale entre la France et le Luxembourg
Alors que l’ancienne convention fiscale, entre la France et le Luxembourg, prévoyait, pour les résidents de France, d’éliminer la double imposition des revenus d’emploi et des revenus fonciers provenant du Luxembourg par l’application de la méthode de l’exemption, la nouvelle convention fiscale du 20 mars 2018 prévoit, pour les revenus perçus, depuis le 1er janvier 2020, que cette double imposition est éliminée par la méthode de l’imputation.
Dans la mesure où ce changement de méthode peut avoir une incidence sur le calcul de l’imposition due au titre des autres revenus imposables en France, il a été décidé que les résidents français qui perçoivent des revenus de source luxembourgeoise peuvent, exceptionnellement, solliciter pour les revenus de 2020 et de 2021, l’application des stipulations de l’ancienne convention fiscale relatives à l’élimination de la double imposition.
Révocation du directeur général de SAS absent lors de l’entretien décidant de sa révocation
Dans un arrêt, en date du 7 septembre 2021 (CA Paris, 7 septembre 2021, n° 19/18733), la cour d’appel de Paris a jugé que la révocation d’un directeur général de SAS, qui a eu le temps de présenter ses observations, n’est pas abusive, malgré qu’il ait été absent lors de l’entretien au cours duquel sa révocation a été décidée.
En effet, l’obligation de loyauté implique que le dirigeant ait eu connaissance des motifs de sa révocation avant qu’elle ne soit décidée, même si elle vise un dirigeant révocable à tout moment, et que l’intéressé ait été mis en mesure de présenter ses observations. Cela n’impose cependant pas, comme le rappelle la cour d’appel, que le dirigeant soit présent.
Obligation de cession d’actions d’un dirigeant : sous quelles conditions ?
La chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du 22 septembre 2021 (Cass. com. 22 septembre 2021, n° 1923.958), que ne revêt pas un caractère potestatif une condition dont la réalisation dépend, non de la seule volonté du créancier de l’obligation, mais de circonstances objectives, susceptibles d’être contrôlées judiciairement.
Dès lors, n’est pas potestatif, l’engagement d’un actionnaire de céder ses actions, en cas de révocation, pour justes motifs de son mandat social, dans la mesure où la réalisation de cette condition repose sur une circonstance susceptible d’être contrôlée judiciairement. En effet, la révocation étant prévue pour justes motifs, elle ne dépendait pas du seul pouvoir de l’actionnaire majoritaire.
Poursuite d’activité déficitaire : faute de gestion ?
Dans un arrêt en date du 22 septembre 2021 (Cass. com, 22 septembre 2021, n° 19-18.936), la Cour de Cassation a jugé que la poursuite d’une activité déficitaire n’est pas contraire à l’intérêt social d’une société, dès lors qu’une autre activité de ladite société la compense.
En effet, rien n’interdit à une société de chercher à équilibrer une activité par une autre.
La Cour de cassation avait déjà jugé, par le passé (Cass. com. 21 septembre 2004, n° 1243), que le choix de conserver des activités diversifiées, même déficitaires, n’est pas fautif, dès lors qu’il s’agit d’un choix stratégique dont la mise en œuvre n’est pas contraire aux intérêts de la société.
Détournement du fichier clientèle d’un concurrent
Le démarchage de la clientèle d’un concurrent est licite quand il n’est pas accompagné de procédés déloyaux.
En revanche, le détournement de la clientèle, tel le détournement de fichiers clients, est déloyal.
Ainsi, la Cour de cassation a récemment jugé que le détournement du fichier clientèle d’un concurrent, pour démarcher sa clientèle, est déloyal, peu importe que le démarchage soit massif, ou systématique (Cass. com. 12 mai 2021, n°19-17.714).
Qualité à agir en paiement d’une créance de la société absorbée, par la société absorbante
La fusion entraîne la dissolution sans liquidation de la société absorbée, et la transmission universelle de son patrimoine à la société absorbante. Il en résulte que la société absorbante acquiert de plein droit, à la date d’effet de la fusion, la qualité de partie aux instances antérieurement engagées par la société absorbée.
La Cour de cassation a complété sa jurisprudence en jugeant que la société absorbante a qualité pour agir en paiement d’une créance de la société absorbée, dès la date de l’assemblée générale décidant de la fusion-absorption, laquelle opère de plein droit transmission universelle du patrimoine de l’absorbée à l’absorbante.
La conclusion d’un bail entre une SCI et ses associés afin de déduire les charges foncières est-elle abusive ?
Dans un récent avis (Avis CADF/AC, n° 5/2021 aff. n° 2021-12, 2021-13 et 2021-14), le Comité de l’abus de droit fiscal a considéré que la conclusion d’un bail, entre une SCI et ses deux associés, constitue un abus de droit, dès lors que le bail en question n’avait d’autre but que de permettre la déduction des charges afférentes à l’immeuble loué, qui n’est pas permise lorsque le propriétaire se réserve la jouissance du bien.
Dans cette affaire, l’abus de droit avait été caractérisé sur le plan de la fraude à la loi, mais il aurait également pu être caractérisé sur le plan de la fictivité. En effet, le Comité a pu déclarer fictifs des baux conclus par une SCI au profit de l’associé majoritaire, ou de membres de son entourage proche, dès lors que les charges déduites excédaient largement les loyers, fixés à un niveau anormalement bas, dont la charge effective était en outre assumée par l’associé majoritaire.
Régime de la TVA sur marge en matière immobilière : la réponse de la CJUE
La Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE) a rendu une décision attendue (CJUE, 30 septembre 2021, aff. 299/20), concernant le régime de la TVA sur marge, en matière immobilière, à la suite des questions préjudicielles qui lui avaient été posées par le Conseil d’Etat.
La CJUE confirme l’interprétation retenue par le Conseil d’Etat dans son arrêt en date du 27 mars 2020 (CE, 27 mars 2020, n° 428234), concernant la condition d’identité juridique. Elle estime que la directive TVA exclut l’application du régime de taxation sur la marge à des opérations de livraison de terrains à bâtir lorsque ces terrains acquis non bâtis sont devenus, entre le moment de leur acquisition et celui de leur revente par l’assujetti, des terrains à bâtir.
En revanche, la CJUE considère que la directive n’exclut pas l’application du régime de la TVA sur marge, à des opérations de livraison de terrains à bâtir, lorsque ces terrains ont fait l’objet, entre le moment de leur acquisition, et celui de leur revente par l’assujetti, de modifications de leurs caractéristiques telles qu’une division en lots, ou la réalisation de travaux permettant l’installation de réseaux desservant lesdits terrains.
Quand une SAS peut-elle se dispenser de renouveler le commissaire aux comptes (CAC)
Il résulte des dispositions du Code de commerce (art. L. 227-9-1 et D. 227-1), que les SAS ont l’obligation de nommer au moins un commissaire aux comptes lorsque deux des trois seuils suivants sont dépassés :
- bilan supérieur à 4 M€,
- chiffre d’affaires hors taxe supérieur à 8 M€,
- nombre moyen de salariés supérieur à 50.
Cette obligation cesse lorsque deux des trois seuils susvisés ne sont pas dépassés pendant les deux exercices précédant l’expiration du mandat du commissaire aux comptes.
La Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes (CNCC) a estimé qu’une SAS, qui dépasse deux des trois seuils susvisés, pour la première fois, à la clôture du 6e exercice du mandat du commissaire aux comptes, a l’obligation de désigner un commissaire aux comptes à l’expiration du mandat. Le nouveau mandat pourra être confié au commissaire aux comptes qui était en fonction, ou à un nouveau commissaire aux comptes.