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La Lettre A2CS - Juillet & Août 2024

25/07/2024

Exonération à l’IFI : La location meublée

Pour rappel, sont exonérés au titre de l’IFI, les actifs immobiliers affectés à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale exercée sous forme individuelle et à titre principal.

Selon l’article 975 V 1° du CGI, l’activité de location de locaux d’habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés, est considérée comme commerciale, sous certaines conditions :

  • les membres du foyer fiscal réalisent plus de 23 000 euros de recettes annuelles dans le cadre de cette activité ;
  • les membres du foyer retirent, de cette activité, plus de 50 % des autres revenus du foyer fiscal.


A l’occasion d’une question parlementaire posée au Gouvernement, celui-ci a pu clarifier le régime de l’exonération, dans l’hypothèse où lesdits biens ne dégagent aucun bénéfice.

De ce fait, les locaux d’habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés, qui génèrent un résultat déficitaire, ne peuvent ouvrir droit à exonération, pour leurs propriétaires.


Report d’imposition des plus-values d’apport et abus de droit

Dans un arrêt du 16 février 2024, le Conseil d’Etat précise que le bénéfice du régime de faveur de l’apport-cession de titres (dans le cadre d’opérations de restructuration de groupe) est subordonné au respect de la lettre de la loi, couplé aux objectifs du législateur, et non pas d’obtenir un bénéfice fiscal abusif.

A cette occasion, la rapporteuse publique conclut que « la voie de l’abus de droit reste bien sûr ouverte pour sanctionner des opérations pouvant être regardées comme des montages artificiels dépourvus de toute justification économique et élaborés dans un but exclusivement fiscal ».

En ce sens, cette jurisprudence apporte des modalités d’exercice, relatives au respect de l’esprit des textes, sous le prisme de l’existence de l’abus de droit.

Le juge rappelle, que le respect de la légalité « n’immunise » pas contre le grief d’abus de droit. En effet, l’abus de droit est retenu, certes, bien que la loi soit respectée, mais dans le cas où le but du contribuable n’est d’obtenir qu’un bénéfice fiscal, contraire à l’intention du législateur.

Par cette jurisprudence, le juge rappelle que, tout montage artificiel permettant d’optimiser la situation d’un contribuable, peut être analysé sous le prisme de l’abus de droit.


Régime Dutreil : Les indices pour apprécier l’activité prépondérante

Dans une décision du 12 mars 2024, la Cour d’appel de Versailles a listé quelques indices à retenir, afin d’apprécier le caractère prépondérant de l’activité commerciale d’une société ayant une activité mixte, dans le cadre du régime Dutreil.

Selon la Cour, sont retenus les indices suivants :

  • part de la valeur vénale des actifs affectés à l’activité commerciale par rapport à la valeur totale de l’actif brut de la société ;
  • surface de l’immeuble dédiée à l’activité commerciale comparée à celle affectée à l’activité civile ;
  • pourcentage que représente le chiffre d’affaires procuré par l’activité éligible au regard du chiffre d’affaires total.


En revanche, sont considérés inopérants :

  • le caractère historique de l’activité commerciale ;
  • l’affectation du personnel ;
  • le taux de l’actif immobilisé ;
  • l’affectation de recettes.


Par cette décision, la jurisprudence vient encore un peu plus préciser les conditions d’appréciation de l’activité prépondérante d’une société ayant une activité mixte.


Engagement de revendre : Rare cas de force majeure

Dans un arrêt du 5 mars 2024, la Cour d’appel de Pau a reconnu un cas de force majeure, libérant un marchand de biens de son engagement de revendre dans un délai de 5 ans.

En l’espèce, un marchand de biens avait acquis un bien immobilier, qu’il a loué. Peu de temps après l’acquisition, le locataire cesse de payer les loyers. L’année suivante, le marchand de biens signe un mandat de vente avec un agent immobilier. La même année, le locataire est placé en redressement, puis liquidation judiciaire et intente une action en nullité de la vente.

L’Administration fiscale a alors notifié au marchand de biens un redressement pour non-revente dans le délai de 5 ans de l’acquisition.

Le Tribunal judiciaire, ainsi que la Cour d’appel, ont reconnu la force majeure. En effet, l’arrêt du paiement des loyers, ainsi que le contentieux en nullité de la vente, étaient survenus peu de temps après l’acquisition. De ce fait, la succession d’évènements avait rendu la revente de l’immeuble impossible et une telle situation était imprévisible.

Il est néanmoins nécessaire de préciser qu’il s’agit d’un arrêt d’espèce, et qu’il ne saurait créer une jurisprudence constante en matière de force majeure.


Appréciation de la prépondérance immobilière : Plus-values de cession de titres

Dans une décision du 9 février 2024, la Cour administrative d’appel de Nantes a jugé que, pour apprécier la prépondérance immobilière d’une société, il est nécessaire de prendre en compte la valeur des contrats de crédit-bail immobilier, même si non-inscrits à l’actif de la société.

Pour rappel, sont considérées comme des sociétés à prépondérance immobilière, les sociétés dont l’actif est constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par des immeubles, droits portant sur des immeubles, des droits afférents à un contrat de crédit-bail immobilier ou par des titres d’autres sociétés à prépondérance immobilière.

En l’espèce, le ratio immobilier avait été calculé pour savoir si les plus-values de cession pouvaient bénéficier du régime de quasi-exonération. Pour apprécier la prépondérance immobilière, l’Administration fiscale a tenu compte de la valeur des contrats de crédit-bail conclus par les SCI.

La Cour confirme la position de l’Administration fiscale, en précisant que la valeur des contrats de crédit-bail est à prendre en compte, pour apprécier la prépondérance immobilière, qu’ils figurent ou non à l’actif de la société.


DMTO et engagement de revendre par lots

En matière de droits d’enregistrement, si l’acquéreur prend un engagement de revendre l’immeuble dans un délai de 5 ans, il bénéficie du taux réduit à 0,715 %.

En cas de revente par lots, déclenchant le droit de préemption, le délai est ramené à 2 ans, lorsque le lot était occupé (Com. 7 juillet 2015).

Dans un arrêt du 14 février 2024, la Cour de cassation revient sur sa jurisprudence, et considère que le délai de 2 ans s’applique, même si les lots sont inoccupés, à condition de notification aux locataires, pouvant user de leur droit de préemption.

Elle précise également, que le délai commence à courir à compter de la date d’acquisition de l’immeuble destiné à une opération de découpe, et non à la date de notification des offres.


Taxe annuelle sur les bureaux et espace de « coworking »

Dans un arrêt du 15 mars 2024, la Cour administrative d’appel de Paris précise la qualification des espaces de « coworking », dans le cadre de l’application de la taxe annuelle sur les bureaux en Ile-de-France.

Ces espaces sont qualifiés de « bureaux » si les prestations fournies par la société exploitante, en complément de la mise à disposition des espaces de travail, sont accessoires.

En ce sens, cela comprend les prestations telles que :

  • le service d’accueil,
  • le service de conciergerie,
  • les cuisines,
  • les évènements sociaux et professionnels,
  • les cours de sports...


Cependant, il est impératif que celles-ci revêtissent un caractère accessoire à l’activité principale de location de bureaux.


L’approbation de la rémunération du gérant associé d’une EURL

Par un arrêt en date du 29 novembre 2023, la Cour de cassation a affirmé, que le gérant associé unique d’une EURL devait approuver sa rémunération, par une décision de d’associé.

En l’espèce, le gérant associé unique d’une EURL se versait une rémunération et a cédé ses parts. L’acquéreur le poursuit en remboursement de cette rémunération car non approuvée par une décision d’associé.

La Cour de cassation juge que, même si le gérant était associé unique, il aurait dû approuver sa rémunération par décision d’associé, prérogative imposée par les statuts. Toutefois, la Cour admet que le juge reste libre d’apprécier les faits, afin d’annuler ou non la décision. En ce sens, dans une décision du 9 janvier 2019 (Cass. Com. 9-1-2019), le juge a considéré que la rémunération perçue par le gérant associé unique d’une EURL était régulière, même si elle n’avait pas fait l’objet d’une décision d’associé ; Cette rémunération ayant toujours été régulièrement approuvée, a posteriori.

En synthèse, soucieux du formalisme, même en cas de dirigeant associé unique, il semble opportun d’opter pour une telle décision, en cas de rémunération.


Rupture fautive de pourparlers : Quels préjudices ?

Pour rappel, l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 a modifié le Code civil, créant des interrogations sur l’indemnisation de rupture fautive de pourparlers.

Depuis un célèbre arrêt « Manoukian » (Cass. Com. 26-11-2023), la Cour de cassation rejette l’indemnisation de la perte de chance d’obtenir des avantages futurs. Cependant un doute subsistait.

Une ordonnance 2018-287 du 20 avril 2018 a modifié l’article 1112 al 2 du Code, excluant la perte des avantages attendus comme la perte de chance des avantages.

Dans une stricte application des textes, la Cour de cassation, par un arrêt du 05 juin 2024, exclut l’indemnisation pour perte de chance des avantages futurs et rappelle que, seuls, les préjudices des pertes subies, du fait des pourparlers et études préalables effectuées dans le cadre des négociations, sont indemnisables.


Le remboursement du prêt personnel du dirigeant associé apporté en compte courant est-il déductible de son revenu imposable ?

Dans une décision du 11 juin 2024, le Conseil d’Etat précise les conditions de déductibilité des charges du résultat.

En l’espèce, un dirigeant associé s’est porté caution pour sa société. Celui-ci impute sur ses revenus imposables une fraction des sommes affectées au remboursement de l’emprunt personnel, au motif, qu’il s’agissait de dépenses effectuées en vue de l’acquisition et de la conservation du revenu.

Le Conseil d’Etat le déboute en précisant que ces sommes « ne sont pas déductibles de son revenu imposable, dès lors qu’un tel apport, qu’il soit ou non spontané, le rend titulaire d’une créance sur la société et revêt donc un caractère patrimonial ».

Il s’agit d’un arrêt d’espèce, qui met en lumière les limites de déduction des charges pouvant être considérées comme un enrichissement personnel, à l’appréciation des juges.


La démission du Commissaire aux comptes ne met pas fin au mandat en cours

Dans un arrêt du 10 mai 2024, la Cour de cassation précise que la démission d’un CAC et de son suppléant ne met pas fin au mandat en cours.

La Cour d’appel juge que « la durée du mandat de commissaire aux comptes […] de 6 années […] n’est pas affectée par la démission du CAC […] ».

La Cour de cassation confirme la position de la Cour d’appel et précise que les nouveaux seuils fixés en 2019 par la loi PACTE n’avaient pas vocation à s’appliquer, dans la mesure où le mandant était en cours lors de la promulgation de la loi. Ainsi, les CAC démissionnaires devaient être remplacer pour la durée du mandat restant à courir.

Par ailleurs, concernant les seuils de nomination des CAC, un décret (2024-152) du 28 février 2024 les avait relevés, comme suit : 5M € de total bilan, 10M € de chiffre d’affaires et 50 salariés. Cependant, dans un communiqué, le Président de la CRCC de Paris affirme que ce rehaussement de seuils a été abandonné par le Gouvernement. Nous vous tiendrons informés dans nos prochaines publications de la Lettre du sort de cette mesure.
   
    



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